Le 7 juin dernier, Doug Ford a été élu premier ministre de l’Ontario. À peine deux mois après son élection, il a procédé à des changements majeurs en ce qui concerne la façon dont le gouvernement ontarien entend gérer la vente et la distribution du cannabis récréatif sur son territoire. Initialement, l’Ontario avait opté pour un modèle de vente similaire à celui du Québec, soit par la mise en place d’une société d’État. Maintenant, le gouvernement conservateur privilégie le modèle de l’Alberta, du Manitoba et de la Saskatchewan, qui autorise le secteur privé à vendre le cannabis. Le nombre de détaillants et leur emplacement ne sont pas encore connus, le gouvernement ontarien souhaitant d’abord mener des consultations afin de règlementer la vente par les détaillants privés. Nous savons toutefois que la plateforme web pour la vente en ligne sera opérationnelle dès le 17 octobre prochain, ce qui permettra aux Ontariens de 19 ans et plus de se procurer du cannabis récréatif. Quant aux premiers points de vente privés, ils débuteront leurs activités au cours du printemps 2019.
Doit-on s’attendre à ce qu’un changement de gouvernement suite aux élections amorce des modifications similaires à celles de l’Ontario ?
Avant de répondre à cette question, il est important de se rappeler comment le modèle québécois de vente et de distribution du cannabis récréatif a vu le jour. Les 19 et 20 juin 2017, le gouvernement du Québec a tout d’abord tenu le « Forum d’experts sur l’encadrement du cannabis au Québec », pour ensuite entreprendre des consultations publiques dans différentes régions du Québec, en plus d’une consultation en ligne. Ces actions ont mené à la publication d’un rapport qui fait la synthèse de l’ensemble des consultations effectuées. Les tableaux 3.a et 3.b, qui se trouvent aux pages 7 et 8 de ce document, en lien avec le modèle de vente à implanter aux Québec, démontrent qu’une majorité d’organisations et d’individus étaient alors favorables à la mise en place d’un monopole d’État.
Le projet de loi sur le cannabis a été longuement étudié par les différentes formations politiques représentées à l’Assemblée nationale. Malgré quelques points de divergence, notamment en ce qui concerne l’âge minimum pour acheter et consommer du cannabis et les lieux où l’on peut consommer du cannabis, aucun parti n’a mis en doute le modèle du monopole d’État. Cependant, la première version du projet de loi incluait la possibilité de mettre en place des projets-pilotes pour la vente du cannabis par certains détaillants. Cette possibilité permettait au gouvernement du Québec, à terme, de rendre le modèle de vente de cannabis mixte, à la fois public avec la société d’État et privé avec les projets-pilotes. Toutefois, à la suite des pressions continues de la part des groupes d’opposition, l’option de projets-pilotes permettant la vente par certains détaillants a été retirée de la version finale du projet de loi.
Depuis le 23 août dernier, une élection générale bat son plein au Québec. La campagne électorale, qui prendra fin le 1er octobre, représente une occasion pour connaître davantage la position des différentes formations politiques concernant la légalisation du cannabis. François Legault, chef de la Coalition Avenir Québec (CAQ), s’est positionné rapidement sur la question. Il souhaite, entre autres, s’assurer que les points de vente de la Société québécoise du cannabis (SQDC) soient éloignés des cégeps. Il propose également d’augmenter à 21 ans l’âge minimum pour posséder et consommer du cannabis. Finalement, il interdirait la consommation de cannabis dans tous les lieux publics incluant les rues. Pour sa part, Jean-François Lisée, du Parti Québécois (PQ), souhaite autoriser la culture de deux plants de cannabis à domicile. Québec Solidaire (QS) et le Parti Libéral du Québec (PLQ) sont quant à eux restés muets jusqu’à maintenant.
En considérant la position des différents partis, il est peu probable que le Québec suive l’exemple de l’Ontario, du moins à court terme. Doug Ford avait indiqué, lors de la course à la chefferie et de la campagne électorale ontarienne, son intention d’ouvrir la vente du cannabis au secteur privé. Au Québec, le modèle de la SQDC semble faire actuellement l’unanimité parmi les différentes formations politiques. Cela nous permettra donc de comparer les deux différents modèles, privé versus société d’État, dans les mois et années à venir.