Avec  40 p. 100 de la masse terrestre du Canada qui se trouve dans l’Arctique, notre pays est sans contredit une « puissance arctique ». En 2013, et ce jusqu’en 2015, le Canada assumera la présidence du Conseil de l’Arctique, le principal forum de collaboration formé des huit États de l’Arctique : le Canada, le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège, la Fédération de Russie, la Suède et les États-Unis (l’Alaska, d’abord un territoire d’origine russe, fut acheté par les Américains en 1867 pour sept millions de dollars).
Nombre d’enjeux chauds sont à l’ordre du jour de la présidence canadienne.  Notamment, le gouvernement fédéral prépare actuellement sa soumission à la Commission des limites du plateau continental de l’Organisation des Nations Unies qu’il déposera en 2013. La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS) reconnaît explicitement les droits des États côtiers, comme le Canada, sur les ressources naturelles des fonds et du sous-sol marins au-delà de la limite des 200 milles marins, à partir de leurs côtes, et définit une procédure selon laquelle un État peut déterminer les limites jusqu’où il peut exercer ces droits. C’est donc dire qu’à un moment donné, il y aura une ligne additionnelle sur la carte du Canada indiquant les limites extérieures du plateau continental étendu. C’est un peu comme si nous faisions application pour étendre nos frontières !
Récemment, l’Union Européenne a demandé le statut d’observateur au sein du Conseil de l’Arctique. Le Canada s’y est opposé, entre autres à cause de la position européenne sur la chasse aux phoques. Le gouvernement fédéral a ainsi pris le parti des peuples autochtones qui pratiquent la chasse aux phoques. La Chine a également clairement demandé le statut d’observateur. Ce statut est octroyé selon des critères précis et une décision du Conseil pourrait être prise durant la présidence canadienne. Devant l’intérêt des autres pays porté sur l’Arctique, le gouvernement canadien publiait en 2010 une politique étrangère de l’Arctique afin d’énoncer clairement ses priorités et ses objectifs.
Mais pourquoi tant d’intérêt dans l’Arctique?
Éventuellement avec la fonte des glaces et le réchauffement de la planète, des milliers de nouveaux milles de littoral deviendront accessibles. L’exercice de la souveraineté, la navigation, la sécurité, la protection de l’environnement, le développement des ressources naturelles qui y abondent, les pêches et la gouvernance des habitants du Nord sont autant de sujets qui seront au cœur des enjeux de demain.
L’arctique Canadien est avant tout fantastique.
J’ai visité la région à quelques reprises alors que j’occupais des fonctions au sein du gouvernement fédéral. J’ai vu ses habitants déterminés et aventuriers aux yeux vifs et au mode de vie courageux. J’ai vu les ours polaires, les lièvres arctiques avec de grandes pattes blanches et les phoques au pied du passage du Nord-Ouest. J’avais l’impression d’être dans une histoire fantastique de J.K. Rowling!
Ce jour-là, nous avions voyagé 650 kilomètres pour nous rendre au camp d’observation des glaces de l’île Borden, au nord de l’océan Arctique. C’était une opération scientifique pour préparer la soumission du Canada et du même coup affirmer notre souveraineté.
Au retour, nous avons survolé l’arctique en direction d’Eureka sur un appareil Twin Otter, puis vers Ottawa à bord de l’Hercule qui rentrait du ravitaillement du camp. Une tempête nous empêchait un retour via Resolute Bay. J’ai vu quelque chose de fantastique. Un pays de glace. L’Arctique canadien. Des montagnes plus grandes que les Rocheuses défilaient en série, des lacs, des rivières et du roc glacés. Des aurores boréales arctiques comme dans le monde imaginaire de Narnia.
J’ai vu un pays qui dort sous la glace et qui, un jour, sera le nouveau, nouveau monde. Je crois que nous avons dans l’Arctique canadien un extraordinaire legs aux générations futures et qu’une prise de conscience de tous les Canadiens doit être, à tout le moins, opérée durant la présidence canadienne du Conseil de l’Arctique.