J’ai passé le temps des fêtes en Amérique centrale. Il faisait beau et chaud, merci! J’étais dans un complexe tout neuf avec golf, piscine, plage et une proportion plutôt faible d’Occidentaux comparativement aux gens du coin.
À voir les conditions de vie dans certains petits villages aux alentours, ces natifs qui séjournent à l’hôtel font partie du fameux « 1 % », et même du « 0,01 % ». Mais je ne tiens pas à parler d’inégalité économique, je veux simplement planter le décor. Imaginez la scène : il fait 31 °C, le ciel azur vous gratifie rarement d’un nuage pour vous faire un peu d’ombre, l’océan vient caresser de ses vagues la magnifique plage sablonnée, et à 150 mètres derrière se trouvent piscine, parasols et boissons.
J’y étais à me prélasser quand ça m’a frappé : tous ces natifs portent des Crocs! Le 1 % de là-bas semble les avoir adoptés à 100 %. Ou du moins les hommes et les enfants. Les femmes, elles, chaussent ce que ma tendre moitié qualifie des « talons démesurés ». Mais revenons au but de mon histoire, c’est‑à‑dire l’abondance de Crocs. Je me suis mis à imaginer des scénarios expliquant une telle chose :

  1. J’avais voyagé dans le temps à mon insu et j’étais revenu cinq à dix ans en arrière.
  2. Les grosses pointures de la mode centraméricaine ont craqué pour les Crocs.
  3. Les surplus nord-américains se sont lentement écoulés vers le sud.

Puisque la première des trois explications semblait la plus probable, je me suis dit qu’il devait y en avoir une autre. À ce moment, j’ai eu une révélation… ou plutôt, mes notions de marketing me sont revenues. On dit que chaque marché recèle un potentiel de vente. Les médias sociaux rapprochent les frontières, c’est vrai, mais il n’y a pas que les hispters de Brooklyn qui dictent les tendances.
Puis je me suis mis à faire des liens : certains de nos plus gros clients sont ceux qui commencent à percer le marché canadien. Nous devons les renseigner sur les sous-marchés, les réalités régionales et le profil du public de consommateurs, sauf que nous sautons souvent par-dessus certains principes de base. Nous n’arrivons pas à voir le Canada comme un marché tout neuf ou unique.
Le Canada est pourtant une exception en soi. En matière d’équipement de hockey par exemple, la dominance de CCM sur Reebok s’explique par un attachement historique et culturel.
Si on tient souvent le Québec pour acquis, ce sont en fait les campagnes inédites et bien ancrées dans la culture locale qui y sont les plus appréciées, sinon les plus prisées.
Quand il est question de nouveauté, impossible de simplement se croiser les doigts et espérer. Il faut connaître le public et le marché, notamment les médias, les règlements, les lois, les canaux de distribution, etc. C’est en s’appuyant sur des données mesurables qu’un nouveau produit peut dépasser les attentes.
J’ignore toujours quel axe de vente ont suivi les Crocs en Amérique centrale, mais je sais au moins ceci : que ce soit une question de nouveauté, de chance ou de stratégie, chaque marché, chaque sous-marché et chaque public sont autant d’occasions de repartir à zéro.
Bonne et heureuse année!

 

Par: Joe Peters