Ainsi donc, la CAQ de François Legault souhaite un remboursement des sommes prétendument «volées à l’État» par certaines, voire plusieurs, entreprises du domaine de la construction. La méthode? Apparemment simple : convaincre le gouvernement Marois, aux suites d’une pétition, d’entreprendre les poursuites civiles envers ces mêmes sociétés fautives. Celles-là mêmes qui auraient admis leurs torts, directement ou par personnes interposées, devant la Commission Charbonneau.
Bon. Difficile, évidemment, d’être contre la vertu. Impossible d’approuver le modus operandi qui semble s’être greffé aux institutions publiques, notamment municipales. Ardu de refuser la reddition de comptes de toutes entreprises ou tous dirigeants ayant profité, pendant trop d’années, des largesses et/ou aveuglement volontaire d’un régime politique et policier vraisemblablement ankylosé.
Surfant sur ces mêmes sentiments, lesquels font souvent place à une vindicte populaire où la quête du sang devient une marotte obligatoire, l’opération caquiste se fonde néanmoins sur certains préceptes d’une légalité douteuse.
Doit-on rappeler à Legault et l’ex-policier Duchesneau l’une des conditions-clefs aux témoignages à la Commission Charbonneau, soit l’immunité desdits témoins? Celle-ci, qu’on le veuille ou non, n’est pas à degré variable, mais bien totale et complète. En bref, impossible de poursuivre sur la base unique des témoignages rendus. Voilà qui plomberait joyeusement la valeur intrinsèque d’une requête en dommages.
Dans la même veine, notons que la quasi-totalité des éléments incriminants sont, à cette étape, reliés aux institutions municipales et non aux ministères québécois. Ma question : comment le gouvernement pourra-t-il poursuivre en dommages au nom des municipalités? On comprend que celles-ci sont des créatures de la province, mais reste qu’elles possèdent une personnalité juridique propre.
Autre point : on connait déjà l’excitation médiatique quant à tout nouveau témoignage d’une crapule réelle ou présumée, surtout si celle-ci se veut suffisamment allumée pour projeter les projecteurs sur autrui. La formule est aussi simple qu’éprouvée : suffit de balancer quelconques allégations sur une personnalité plus connue que soi-même afin de s’en tirer indemne ou presque.
Les illustrations pleuvent : Dumont qui balance Tremblay, Cloutier qui balance Chevrette, Bertrand qui balance Duplessis et tutti quanti. À la moindre révélation, les journalistes se jettent ainsi aux trousses du nouvel incriminé, tels des chiens fous en quête de l’os volant.
Le point? Très simple. Qui atteste de la validité de ces témoignages? Qui peut jurer de leur pertinence et véracité ? De leur valeur légale? Nombreux sont ceux qui, salis à souhait par un ancien-tout-croche-devenu-gentil-aux-yeux-du-public-et-applaudi-à-Tout-le-monde-en-parle, ont nié les informations véhiculées à leur endroit.
Et s’ils avaient raison? S’ils étaient effectivement innocents? La présomption d’innocence semble avoir depuis foutu le camp de cette société, et ceci n’est guère surprenant.
Implicitement décrite et décriée depuis longtemps par les médias comme un méprisable outil utile aux bandits, qui, dans cette population, croit qu’il peut réellement y avoir fumée sans feu? Pas Legault et la CAQ, visiblement.
Reste donc les tribunaux. Isolés des pressions populistes et de leurs tendances cannibales, ceux-ci devraient distinguer le vrai du faux et, selon toute vraisemblance, mettre la hache dans maintes poursuites-bidons potentiellement entamées par le gouvernement.
Si bien sûr celui-ci devait bêtement tomber dans le piège caquiste.
###
Par souci de transparence, nous tenons à préciser qu’H+K Stratégies compte parmi ses clients certaines sociétés nommées devant la commission Charbonneau.