Depuis plusieurs mois, une tendance me décourage de plus en plus dans notre beau pays : la décomposition et la distorsion d’enjeux complexes de politiques publiques en fausses alternatives.
Nous débattons des questions difficiles de politiques publiques au lieu d’en discuter ou de dialoguer à leur sujet, ce qui risque de miner notre capacité à trouver des solutions. Loin de l’échange d’idées, ces débats dégénèrent en affrontement de volontés.
Bien pire, on croit de plus en plus que seuls de petits groupes d’experts peuvent trouver des solutions, que ces questions sont trop difficiles à comprendre pour le grand public. Cette attitude ne fait que nourrir le cynisme et la méfiance.
De nos jours, les citoyens ont un accès instantané à des sources infinies d’information et s’attendent à ce qu’on leur demande leur opinion et qu’on en tienne réellement compte.
À notre époque où l’engagement prévaut, les secteurs public et privé doivent collaborer avec les parties prenantes pour les rallier à leurs objectifs, ce que certains appellent l’obtention d’un « permis social ».
Pour ma part, je n’ai jamais vraiment adopté ce terme, car il suppose un processus formel par lequel les gouvernements ou entreprises pourraient obtenir une sorte de certificat officiel d’approbation publique.
Dans les faits, l’acceptation sociale est fluide et dynamique : elle change constamment, s’obtient difficilement, mais se perd au contraire facilement. Son suivi et son maintien passent par une interaction diligente et vigilante avec le public visé.
Mieux encore, les organisations devraient engager leurs principaux publics cibles avant même de fixer leurs objectifs : les solutions proposées sont plus susceptibles d’être les bonnes quand elles sont collectives.
Dans les pays développés et démocratiques comme le Canada, très peu de considérations de politique générale relèvent exclusivement du secteur public ou privé. Pratiquement tous les enjeux les plus pressants touchent et englobent ces deux sphères.
En répondant aux questions épineuses actuelles, les gouvernements et les entreprises s’obligent à rendre des comptes aux membres du public, en leur qualité de citoyens, de clients, de contribuables, d’investisseurs, d’électeurs ou d’employés.
Ainsi, il est impossible d’engager le public au moyen d’un faux sondage qui demande aux répondants de choisir entre deux options simplistes diamétralement opposées. Pour que leur engagement fonctionne, les citoyens doivent y croire.
La collaboration avec des intervenants du public élargit non seulement l’éventail d’idées à explorer, mais garantit que ces intervenants auront tout intérêt à appuyer les décisions prises.
Les grandes mutations démographiques et technologiques de notre époque multiplient les enjeux politiques. Or, la solution peut venir de partout. Il faut prêter l’oreille.